Chiens de piste

Date : Mardi 04 mars 2008 @ 20:10:14 :: Sujet : Pistage Utilitaire



Les chiens pisteurs
J. ORTEGA

Le chien de piste :
C’est un chien qui a été éduqué pour utiliser son instinct au service de l’homme. La piste consiste à prendre une odeur de référence et à suivre celle – ci, qui peut être imaginée tout le long du trajet de la personne sous la forme d’infinitésimales bulles chimiques enchevêtrées, écrasées, ou en suspension dans l’air.
Différents facteurs peuvent influer sur la réussite. Pour que le chien parvienne rapidement jusqu'à’ l'objet ou la personne ou l’animal recherché (piste de sang). Il s’agit principalement : - De la qualité de l’odeur de référence (qui permet au chien de mémoriser ses caractéristiques chimiques qui sont uniques).
-          Du délai d’intervention. Plus on part longtemps après, moins l’odeur persiste sur le trajet.
-          L’odeur de la personne à rechercher qui peut être plus ou moins forte à partir de sa transpiration, des vêtements qu’il porte, des produits chimiques dont – il s’est imprégné (parfum, tabac, alcool, drogue, etc.)
-          Les conditions météorologiques : pression atmosphérique, la température de l’air, l’humidité, la pluie, le soleil, le gel, la brume, etc.
-          Les conditions du terrain : sol sablonneux, labours, terrain cultivé, bitume, béton.
-          De la manière d’évoluer de la personne à rechercher ou de celle qui a déposé les objets à retrouver. Il est évident qu’un personne qui trace les pistes comme en concours n’est pas trop difficile à retrouver pour le chien expérimenté, il en va autrement quand celle – ci fait tout pour semer ses poursuivants : tourner en rond, sauter les fossés, revenir sur ses pas , marcher dans un ruisseau, passer d’un arbre à l’autre, etc.
-          Les qualités du chien avec ses possibilités innées (capacité olfactive), ses caractères héréditaires, son tempérament, son intelligence.
-          L’éducation donnée par le maître. Il existe plusieurs méthodes pour mettre en place un apprentissage correct, même si tous les chiens sont aptes à pister de manière instinctive.

Le chien est un nez :
Le chien se situe parmi les as de l’olfaction dans l’espèce animale. Il possède en moyenne 200 millions de cellules olfactives (l’homme n’en a que 5 millions), toute sa vie sociale et la plupart de ses comportements instinctifs sont basés dessus. Dès la naissance il est capable de sentir alors qu’il est sourd et aveugle et lorsqu’il vieillira il perdra sa vue son ouïe mais conservera jusqu’au bout l’olfaction. On remarquera que dans les pistages les plus difficiles comme la piste pratiquée au championnat du monde les chiens les plus performants ont une moyenne d’âge de 8 ans.
Vitus B. Droscher dira “ le secret du flair du chien réside non seulement dans l’énorme concentration de cellules sensorielles, mais aussi, et surtout, dans leur fonctionnement. Une comparaison fictive aidera à comprendre. Une des odeurs déclenchées par la transpiration humaine ou animale est l’acide butyrique dont un gramme contient sept milliards de fois un million de molécules ; un chiffre inimaginable. Si on laissait cet acide se répandre au même moment dans toutes les salles d’un gratte – ciel de dix étages – expérience qu’il est seulement possible d’imaginer, un homme ne sentirait cette odeur qu’en collant rapidement son nez à la porte. Mais si ce même gramme de parfum se dilue dans l’air au – dessus de Hambourg, le chien y est encore sensible jusqu’à cent mètres d’altitude. ”
Les emplois du chien pisteur
On peut diviser ceux – ci en deux catégories : la piste pour la recherche de personne disparue, essentiellement utilitaire (en France, il existe également des épreuves à mi – chemin entre l’utilitaire et le concours) et la piste de concours avec attribution de points et classement.

La piste utilitaire
Le chien de recherche a une formation humanitaire la plupart du temps, il s’agit en effet de retrouver le plus vite possible la personne qui a disparue et qui peut être en danger de mort. Imaginons qu’une personne ait un accident sur l’autoroute en plein hiver par des températures au dessous de 10°C. Dans sa voiture le chauffage fonctionnait et elle s’était mise à l’aise ne portant qu’une chemise. Lors du choc le traumatisme est tel qu’elle perd la notion du monde qui l’entoure. De manière totalement inconsciente elle va se relever de l’amas de ferraille qu’est devenue la voiture et insensible au froid elle va se mettre à marcher droit devant elle, sans but, pendant des kilomètres. Il est évident que le délai d’intervention est essentiel pour la sauver rapidement, sinon c’est la mort assurée par hypothermie.
Dans le cas d’un enfant qui fait une fugue il en va de même, surtout dans des zones à risque avec rivière, trou de mine, carrières, etc.
On comprend pourquoi il importe peu que le chien ait le nez au sol ou pas, qu’il galope ou avance en zigzag, qu’il ne désigne pas ou ne ramasse pas les objets perdus par la personne, l‘essentiel c’est de retrouver celle – ci dans les plus bref délai.
Lorsqu’il s’agit de la police ou de la gendarmerie le fait de découvrir les objets perdus par un criminel peut être important pour l’enquête, mais nous entrons dans un autre type de recherche où la personne que l’on doit retrouver peut éventuellement être dangereuse.
On peut dire que c’est la formation la plus difficile qu’il soit et il faut compter pas moins de 4 à 5 ans de travail quasi quotidien, pour obtenir un chien opérationnel, pouvant intervenir dans des conditions extrêmes et sur les terrains les plus difficiles (pistage en pleine ville sur le bitume).
La piste de concours :
Pistage Français
Il s’agit d’épreuves progressives en difficulté qui se divisent en pistage libre et en pistage au trait de limier.
Le pistage libre
Une personne étrangère va parcourir un trajet déterminé avec plusieurs angles aiguës ou droits et déposer au bout un bout de bois. Le maître mettra son chien au départ de la piste, matérialisé par deux piquets distants de 10 m, et enverra son chien à la recherche de l’objet. Le chien doit le retrouver et le ramener rapidement à son maître.
Le pistage au trait de limier
Le trait de limier est un harnais dont on équipera le chien pour ne pas le gêner dans son travail, le maître y fixera une corde ou une lanière de cuir de 10 m (qu’on nomme longe) qu’il tiendra à son extrémité pendant l’exercice de flair. C’est également une personne étrangère qui trace la piste avec plusieurs angles et, selon la catégorie, elle restera au bout seule, pour que le chien la retrouve et la désigne à son maître en aboyant, ou bien se placera à côté de deux autres personnes afin que le chien parvienne à l’identifier sans erreur. Que ce soit en pistage libre ou en pistage au trait de limier il s’agit d’une piste “ chaude ” ce qui signifie que le maître et son chien travaillent dès que le tracé est réalisé. Dans le programme de compétition du pistage Français il existe également un exercice de piste “ froide ” où le chien est mis au travail de flair une heure après que le tracé ait été fait.

Pistage RCI :
Les épreuves sont réglementées par la Fédération Cynologique Internationale. Dans ce programme complet le pistage ne représente qu’un tiers, il reste encore au chien à démonter ses qualités en obéissance et au mordant sportif. Ces concours sont pratiqués par tous les pays et chaque année un Championnat du monde leur permet de se confronter. Toutes les pistes R.C.I. (Règlement pour concours Internationaux) sont des pistes froides et selon la catégorie, les difficultés sont plus ou moins importantes. Pour les débutants, le départ a lieu 20 minutes après que le maître ait tracé sa piste. Pour la classe 2, une demi – heure après, enfin pour la classe 3 une heure après, les pistes étant tracées par un étranger.
Les tracés sont fait uniquement d’angles droits et le chien devra découvrir les objets déposés par celui qui a réalisé la piste : 2 objets en classe I et II, 3 objets en classe III.
Si en piste française la tenue de piste du chien (la manière de travailler) n’est pas trop sévèrement pénalisée, en RCI les jugements sont très pointilleux.

Le pistage FCI ou piste Championnat du monde :
C’est également un programme international qui réunit chaque année les meilleurs pisteurs de chaque pays pour un championnat du monde. Il n’y a que des épreuves de flair et on peut dire que c’est sans doute le programme de compétition le plus difficile pour le chien.
Cette fois le tracé sera très ardu avec 2.000 pas, 7 angles aigus ou droits, 7 objets, des changements de terrain, des traversées de chemin...
Pour corser cela le départ n’a lieu que 3 heures après que le tracé ait été fait. Les jugements sont souvent d’une rigueur excessive compte tenu des difficultés.
Le traceur
Il ne peut y avoir de pistage sans une personne qui réalise un tracé de piste, lorsqu’il s’agit de la piste utilitaire n’importe qui peut s’improviser traceur, c’est d’ailleurs bien mieux qu’une personne expérimentée car le parcours se rapproche de la réalité. En concours, il est absolument nécessaire d’avoir affaire à des personnes connaissant sur le bout des doigts le règlement et ayant une expérience de terrain sans faille.
Je l’ai écrit dans mon ouvrage sur le Flair du chien et j’ai demandé à M. Roshardt alors président de la CUN, que soit mis en place très vite une formation des traceurs sanctionnée par un examen avec un Brevet comme cela existe dans les autres pays.
Depuis, la formation de traceur existe.

Le Flair du chien dans l’antiquité
Cette histoire nous est racontée par Plutarque écrivain et moraliste grec qui vivait vers 100 après J. – C. : “ Mais, ajoute – t – il, ce que nos pères ont vu pendant qu’ils faisaient leurs études à Athènes est encore plus curieux :
Un voleur s’étant glissé dans le temple d’Esculape en avait dérobé plusieurs vases d’or et d’argent et sortit, croyant n’avoir été vu par personne. Un chien nommé Capparus, qui gardait le temple, avait bien aboyé, mais aucun des ministres du dieu n’était venu à ses cris. Capparus se mit donc à la poursuite du sacrilège et, bien que celui – ci lui jetât des pierres pour l’éloigner, il ne laissa pas de le suivre sans relâche.
Quand le jour fut venu , il le suivit de plus en plus loin, mais sans le perdre de vue. Si le voleur lui jetait du pain, il ne le prenait pas. S’il se couchait pour dormir, il passait la nuit à quelque distance, tout en restant attaché aux pas de cet homme ; quand il rencontrait des passants, il allait à eux, les caressait et courait ensuite vers le voleur, en aboyant de toutes ses forces, comme pour dire qu’on l’arrêtât.
Ceux qui poursuivaient le sacrilège, ayant appris ces détails des personnes qu’ils rencontraient, reconnurent le chien Capparus dans la description qui leur en fut faite ; ils atteignirent enfin le voleur entre Corinthe et Mégare et le ramenèrent à Athènes précédé du chien, qui par les plus vives démonstrations de joie, semblait se faire honneur de la capture dues à ses soins.
Les Athéniens ordonnèrent que Capparus fût nourri aux dépens du trésor public, et un homme fut spécialement chargé d’en avoir le plus grand soin. ”
Le chien de sang
On nomme ainsi un chien spécialisé dans la recherche des grands animaux blessés soit par acte de braconnage soit par acte de chasse ou par les voitures sur les routes. Le but c’est de former un chien à suivre les traces de ces animaux jusqu’au bout, il existe des races sélectionnées pour cela, comme le Rouge de Bavière ou le Rouge de Hanovre, mais n’importe qu’elle race peut faire l’affaire et on voit souvent des Teckels pister avec brio.
Pour en savoir plus, lire l’ouvrage de J. ORTEGA “ Le flair du chien ”  







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